Flaubert et Martin du Gard

Les Amis de Flaubert – Année 1958 – Bulletin n° 13 – Page 42

 

Flaubert et Martin du Gard

On a beaucoup parlé de Flaubert à propos de Martin du Gard ; je ne pense pas que la comparaison soit très pertinente. L’un et l’autre ont habité la campagne et beaucoup travaillé. Mais Flaubert, sans doute, s’est moins soucié du vrai que de la structure de romans et plus encore de la structure des phrases. Il en a inventé quelques-unes et prêté par là au pastiche.

Roger Martin du Gard ne fournira guère aux Cahiers d’expressions de futurs écrivains. C’est une erreur de croire que « le réalisme » répond à une préférence de la vérité, il signifie une certaine esthétique. Les lavandières de Renoir ne sont pas plus vraies que les déesses et les nymphes de Poussin, mais elles sont plus rouges. Et Madame Bovary n’est pas plus vraie que les héroïnes de Walter Scott, Diana Vernon ou Annie de Geierstein ; elle est peinte avec d’autres couleurs. L’amour du vrai ne se confond pas avec celui du gris ou du marron.

(La Table Ronde, octobre 1958).