1961 Bibliographie 1

Les Amis de Flaubert – Année 1961 – Bulletin n° 18 – Page 75

 

Bibliographie

 

Sommaire :

Où trouver une bonne bibliographie des œuvres de Flaubert et des ouvrages à lui consacrées ?, P. 60

Critique littéraire

La Vie passionnée de Maupassant, par Stephen Coulter, p. 75-76 ‒ Le Décor chez Guy de Maupassant, p. 76 ‒ On reading Flaubert, p. 76-77 ‒ Le 8 mai 1880, Flaubert mourait à Croisset, p. 77

Bibliographie, p. 78

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Où trouver une bonne bibliographie des œuvres de Flaubert et des ouvrages à lui consacrées ?

[Suite à la question posée par F. Cotugno.Voir Bulletins 15 et 16]

Réponse :

Une excellente étude de l’œuvre de Flaubert a paru dans le Tome IX de l’Histoire de la Littérature Française (de Calvet), volume consacré au Réalisme, par René Dumesnil. Cette étude, qui tient les pages 87 à 119 du volume, est suivie d’une Bibliographie très détaillée.

Toutefois, il y a lieu d’ajouter à cette Bibliographie les deux opuscules récents de :

La Varende : sur Flaubert. Éd. du Seuil.

Jacques Suffel : sur Flaubert. Éd. Presses Universitaires.

 

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CRITIQUE LITTÉRAIRE

La Vie passionnée de Maupassant, par Stephen Coulter
Éd. Seghers, « L’Inter ». Traduction de J.-J. Villard

On est toujours embarrassé de faire des réserves sur des œuvres touchant des sujets qui vous tiennent à cœur. Il serait préférable d’adresser des éloges aux auteurs de ces œuvres. Mais, à grand regret, ce ne saurait être le cas d’une critique concernant un ouvrage d’importance que Stephen Coulter vient de consacrer à Guy de Maupassant sous le titre indiqué plus haut.

Chacun sait que la vie d’un homme de lettres (je parle évidemment de sa vie privée), encore qu’elle ait parfois quelque influence sur son œuvre, ne nous concerne pas. Flaubert s’est toujours élevé avec force contre cette intrusion dans l’existence personnelle des écrivains « le public ne doit rien savoir de nous », disait-il. Tôt ou tard, on aboutit à un ramassis de petits potins haussés au niveau de la pensée du héros à connaître, et qui en sont bien loin ! Il est, à notre sens, un peu regrettable que Stephen Coulter ait méconnu cette règle. Admirablement présenté, recouvert de sa « jaquette », le volume fleure le sensationnel, l’inédit ; on s’attend à trouver une exégèse puissante, fortement documentée, des sources claires, précises et pertinentes. Ce n’est, hélas ! qu’une suite de petits clichés pris ici et là dans la vie évidemment passionnée de Guy de Maupassant. Rien de saillant, tout sur le même plan et d’une uniformité qui étonne, déconcerte et lasse un peu. L’auteur y met au même niveau la manière dont on se lavait les pieds au Séminaire d’Yvetot, opération appelée, paraît-il, pédiluve et se donnait trois fois par an, les premières amours de Maupassant (grandes précisions à l’appui), les premières rencontres de Maupassant et de Flaubert, où Gustave Flaubert est représenté comme hurlant sans arrêt (il ne faudrait tout de même pas exagérer !), la manière dont Maupassant accueillait et recueillait les femmes (on se demande où l’auteur a pris ces renseignements d’une technicité particulièrement poussée) et des conversations dialoguées, comme un juge d’instruction n’en enregistra jamais, avec les contemporains, et d’une manière générale, le récit d’une vie plus que passionnée, mécanisée, à l’instar de ces films d’aventure où l’on voit des figurants faire tout ce qu’ils peuvent pour donner un peu de relief à une action à peu près inexistante.

Pas un mot de l’œuvre, pas un mot des souffrances de Maupassant (il en eut !), pas un mot de sa littérature et de l’épanouissement de son œuvre (Maupassant est l’un des auteurs les plus lus du monde entier), pas un mot de l’influence profonde et décisive de Flaubert sur Maupassant, son disciple !

C’est une méthode nouvelle, nous ne l’ignorons pas, que celle qui consiste à mettre au premier plan la vie des hommes et des femmes et de laisser dans l’ombre la genèse et l’expansion de leurs œuvres. On agit ainsi pour Victor Hugo, pour Balzac, pour Musset. Il faut conquérir le public, nous le savons, pour que l’édition soit payante, mais le lecteur, qui sait bien des choses sur la vie intime des héros, n’apprend rien de la valeur de leurs œuvres.

Bien sûr, lisez l’ouvrage de M. Stephen Coulter ; mais, aussitôt après, lisez Pierre et Jean, de Maupassant, et la description de Rouen, vue de Canteleu. À cette condition, mais à cette condition seule, votre faim sera calmée.

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Le Décor chez Guy de Maupassant,
par C. Luplau Janssen. (Édition Muntsgaard, 6 Norregade, Copenhague)

Après la critique ci-dessus, nous sommes parfaitement à l’aise pour vanter comme il convient l’ouvrage de C. Luplau Janssen. Voici au moins une thèse admirablement étayée et documentée.

On sait quel prix, suivant les préceptes de Flaubert, le grand conteur que fut Maupassant attachait à la description du paysage. Avant de faire vivre ses héros, Maupassant plantait le décor de ses paysages, pensant, à juste titre d’ailleurs, que l’âme des habitants n’est pas autre chose que l’âme de l’habitat.

M. Luplau Janssen, en savant exégète, s’est plu à montrer combien les éléments extérieurs avaient de l’importance pour Maupassant. « Le décor d’un roman, dit notre biographe, est la description du milieu, de la scène où le déroule l’action. Le décor est indispensable ».

Maupassant classait ces décors par groupes. L’atmosphère, les extérieurs, les arbres, les maisons, les villes, même les odeurs, tout cela était analysé, détaillé, mis en place en quelques lignes, parfois en quelques mots. Et M. Luplau Janssen de faire de nombreuses citations prises dans les textes mêmes de Maupassant où, en quelques traits, notre grand romancier a planté le décor.

Les lieux où se déroule l’action ont une importance capitale et cela nous vaut d’admirables citations de Maupassant, extraites de ses œuvres. Recommandons tout spécialement la célèbre description de Rouen, vue de Canteleu, et aussi une description topographique et touristique de Rouen à citer en exemple.

L’ouvrage est complété par une Bibliographie sur l’œuvre de Maupassant comme il serait souhaitable que tous les travaux d’exégèse en eussent.

 

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On Reading Flaubert
Sous le titre anglais : On Reading Flaubert, Margaret G. Tillet publie à Londres, aux Éditions Oxford University Press, un remarquable ouvrage d’exégèse sur Flaubert et intitulé (traduction française) : En lisant Flaubert.

On est toujours frappé et très heureux de voir combien, à l’étranger, Gustave Flaubert est lu, apprécié et aimé. Margaret Tillet, qui connaît à fond l’œuvre de Flaubert, a analysé d’une plume objective, précise et pertinente cette œuvre, en ayant la déférente sagesse d’illustrer ses dires de la prose même de l’écrivain.

C’est là une excellente méthode qui console largement de ces travaux dits aussi d’exégèse où l’on voit (avec peine !) le critique donner largement un avis strictement personnel, en dénaturant même, au besoin copieusement, le texte analysé.

Miss Margaret Tillet a agi tout autrement avec une constante fidélité à laquelle il faut rendre un juste hommage. Chaque roman de Flaubert est analysé à tour de rôle, analyse étayée de nombreuses citations prises dans la Correspondance de l’écrivain.

C’est là un travail de haute conscience qu’il convient de signaler et d’encourager.

Ce travail se clôt par une Bibliographie concernant les œuvres de Flaubert et les ouvrages consacrés à l’écrivain. Cette Bibliographie, très complète, est un modèle du genre.

Les éditeurs ont eu la bienveillance de nous faire parvenir un exemplaire de l’ouvrage de Margaret Tillet. Nous les en remercions de tout cœur.

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Le 8 mai 1880, Flaubert mourait à Croisset
Notre ami Jehan Le Povremoyne a écrit dans le Paris-Normandie du lundi 9 mai 1960 une chronique littéraire concernant la mort de Flaubert, à Croisset, le 8 mai 1880.

Encore que le sujet ne prête guère à humour, notre ami a peint « l’atmosphère » qui régna à Rouen, lorsque la fatale nouvelle parvint, par l’intermédiaire de la presse, aux Rouennais. Le dialogue d’entre « M. Jourdain » et son épouse est digne de Bouvard et Pécuchet, ce qui est le meilleur éloge qu’on puisse adresser à M. Le Povremoyne.

 

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BIBLIOGRAPHIE

CIGADA (Sergio). — Genesi e struttura tematica di Emma Bovary, dans : Contributi del Seminario di filologia moderna. — Série francese, vol. I. — Édition Milano. Société éditrice « Vita e Penserio » 1959.

CIGADA (Sergio). — La Leggenda aurea di Jacopo da Voragine e La Tentation de Saint-Antoine de Flaubert. — Dans : Contributi del Seminario di filologia moderna. Série francese, vol. I. — Édition : Milano. Société éditrice « Vita e Penserio », 1959.

MATIGNON (Renaud). — Flaubert et la Sensibilité moderne. — Tel Quel, n° 1, printemps 1960.

LUGLI (Vittorio). — Bovary italiane e altri Saggi. (Flaubert, Feydeau etc…). — Dans : Aretusa. Collection de Littérature, n° 10. — Édition : Caltanissetta, Roma. S. Sciascia Editore, 1959.

BIELER (Arthur). — La couleur dans Salammbô. — Dans : French Review, février 1960.

LAMBIOTTE (Auguste). — Les exemplaires en grand papier de la Tentation de Saint-Antoine et les Trois Contes. — Dans : Le Livre et l’Estampe, n° 20, 1959.

PONS (Roger). — Explication française. Rouen. (Flaubert, Madame Bovary, Ch. III, 5. Appendice : Rouen vu par Maupassant (Bel Ami, 2°, page I). — Dans : L’Information Littéraire, janvier-février 1960. Voir aussi : Bulletin Flaubert n° 17.

QUEVAL, (Jean). — Raymond Queneau chez Flaubert. — Dans : Mercure de France, janvier 1960.

ZAGORA (Helen Grâce). — A historical archaeological approach : Flaubert’s Hérodias. — Dans : The Legend of Salome… Édition : Droz à Genève ; Minard à Paris, 1960.

FLAUBERT (Gustave). — Le Nil, d’après les Notes de Voyage et Correspondance Flaubert, à l’occasion de son Voyage en Égypte et en Orient de 1849 à 1851 avec Maxime du Camp. — Éditions les Cahiers d’Estienne. École Estienne, Paris, 1960.

TILLET (Margaret G.). — On Reading Flaubert. — Éditions Oxford University Press, Londres, 1961.

LE POVREMOYNE (Jehan). — Le 8 mai 1880, Flaubert mourait à Croisset. Paris-Normandie, lundi 9 mai 1960.