À qui appartiennent aujourd’hui les documents flaubertiens ?

Les Amis de Flaubert – Année 1968 – Bulletin n° 33, page 44

 

À qui appartiennent aujourd’hui les documents

flaubertiens ?

Lors de la succession de la nièce de Flaubert, Madame Franklin-Grout, des manuscrits, projets, notes, études, cahiers du romancier rouennais furent vendus aux enchères à Paris, à l’Hôtel Drouot, les 18 et 19 novembre 1931. Dans le catalogue que nous avons, un assistant a noté les prix proposés et d’adjudication des nombreux lots. Plusieurs intéressent L’Éducation sentimentale qui, actuellement, nous intriguent davantage. Un manuscrit de celui-ci, environ 2.000 pages manuscrites, sur papier vergé grand format.

Le catalogue donne ces renseignements : il existe deux versions de l’Éducation sentimentale de la main de Gustave Flaubert. La première version est la propriété d’un collectionneur réputé ; la seconde, qui est le texte définitif, est léguée par Mme Franklin-Grout au Musée Carnavalet ; ces brouillons de l’Éducation sentimentale sont donc d’un très grand intérêt pour révéler l’énorme travail, la conscience admirable du grand écrivain. Ces brouillons, esquisses et plans furent mis en vente à 5.000 F, les enchères s’élevèrent jusqu’à 33.000 F, et le manuscrit fut adjugé à l’auteur-comédien Sacha Guitry et demeure la propriété de sa veuve, aujourd’hui.

Un autre lot, dans une chemise de la main de Flaubert « Renseignements pour l’Éducation sentimentale » le contenu comportait : plan des terrains de courses du Champ de Mars, trois lettres de Duplan, notaire, mars 1869, dossier concernant la Garde Nationale, récit d’un témoin de juin 1848, une page de la main de Flaubert sur les saisies, une traite protestée et son protêt, trois pages de Flaubert et un mémorandum sur les situations difficiles dans les affaires, explication par Flaubert des billets de complaisance, nombreuses pages ou fragments de pages sur les diverses affaires et la manière de les résoudre, sur la médecine, les cliniques, sur la législation minière de l’ancienne monarchie, sur l’association houillère, résumé de l’affaire des houillères de l’Aveyron, renseignements sur la Société des Houillères de France, renseignements sur les tiers ordres, locutions champenoises, retour des cendres de Napoléon 1er, liste des noms de bourgeois, étapes de la création du suffrage universel, renseignements sur les horaires des Messageries de Fontainebleau à Paris en 1848, un menu chez Barras, un menu de 1847. Un menu de 1818, renseignements sur les droits de succession, l’office des morts, la messe, renseignements sur les courses, renseignements sur les cours d’agrégation, bibliographie juridique, le « Calve Head Club », quelques pages des premières idées. Ce lot mis à prix à 4.000 F fut seulement adjugé à 1.650 F à Mme Armand Dorville.

Egalement des lettres concernant l’Éducation sentimentale : une lettre d’Amédée Achard concernant les endroits habituellement choisis pour les duels au Bois de Boulogne, cinq lettres de F. Baudry, quatre lettres de Maxime du Camp, dont on cite avec ironie les mots que les gens du monde ne citent jamais, deux lettres de Duplan sur les Canuts et un système d’escroquerie commerciale, une lettre de Feydeau, deux lettres de Florimont sur les duels et les concessions dans les cimetières, une lettre de Pouchet sur la flore des rives de la Seine, une lettre de Louise Pradier sur la manière de procéder des huissiers chez une « cocotte », et un feuillet grand format où Flaubert a établi une liste de tous les écrivains à qui il a été envoyé un exemplaire de l’Éducation sentimentale où il a noté en quelques mots, l’« accueil fait à son envoi », par exemple Victor Hugo, Zola, Renan.

Depuis trente-cinq ans, ces papiers ont dû changer de possesseurs et il serait intéressant de savoir aujourd’hui qui les possède ?