Concordances entre l’Éducation sentimentale et Madame Bovary

Les Amis de Flaubert – Année 1972 – Bulletin n° 40, page 22

Concordances entre l‘Éducation sentimentale
et Madame Bovary

Suite de l’article de Roger Bismut

 

Nous nous référons à l’édition originale de Madame Bovary
(Paris, Michel Lévy 1857 en 2 tomes, mais avec pagination continue),
et à l’édition dite définitive de l’Éducation sentimentale
(Paris, Charpentier, 1925, en 2 volumes)
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 de L’Éducation sentimentale et de Madame Bovary

 

Éducation sentimentale

Madame Bovary

Un jeune homme de dix-huit ans, à longs cheveux… (I, 3). Un jeune homme à chevelure blonde… (114).
M. Frédéric Moreau, nouvellement reçu bachelier, s’en retournait à Nogent-sur-Seine, où il devait languir deux mois avant d’aller faire son droit. (4). M. Léon, tout en étudiant son droit… (327).
Il se déclama des vers mélancoliques (5). Léon les déclamait d’une voix traînante… (140).
…il vit un monsieur qui contait des galanteries à une paysanne… (5). …il débitait des galanteries d’estaminet à une jeune paysanne blonde. (41).
Frédéric pensait à la chambre qu’il occuperait là-bas, au plan d’un drame, à des sujets de tableaux, à des passions futures. (5). Et il se mit à faire des préparatifs intérieurs ; il arrangea d’avance ses occupations. Il se meubla dans sa tête un appartement. (166).
Ses bandeaux noirs, contournant la pointe de ses grands sourcils, descendaient très bas et semblaient presser amoureusement l’ovale de sa figure. Sa robe de mousseline claire, tachetée de petits pois, se répandait à plis nombreux. ( 7). Ses cheveux, dont les deux bandeaux noirs semblaient chacun d’un seul morceau, tant ils étaient lisses… ( 24).Ses bandeaux, doucement bombés vers les oreilles, luisaient d’un éclat bleu. (11).Son vêtement, ensuite retombait des deux côtés sur le siège, en bouffant, plein de plis… (140).
 … un long châle à bandes violettes était placé derrière son dos… Elle avait dû, bien des fois,… s’en couvrir les pieds… (8). … en recommandant qu’on l’ensevelît dans ce beau couvre-pieds à bandes de velours, qu’il tenait d’elle… (332).
C’était une romance orientale, où il était question de poignards, de fleurs et d’étoiles. (9). Il était question de fleurs, de vers, de la lune et des étoiles. (397).
L’homme en haillons chantait cela d’une voix mordante ; les battements de la machine coupaient la mélodie à fausse mesure ; il pinçait plus fort, les cordes vibraient ; et leurs sons métalliques semblaient exhaler des sanglots et comme la plainte d’un amour orgueilleux et vaincu. (9). Un amas de guenilles lui recouvrait les épaules… Sa voix, faible d’abord et vagissante, devenait aiguë. Elle se traînait dans la nuit, comme l’indistincte lamentation d’une vague détresse, et, à travers la sonnerie des grelots, le murmure des arbres et le ronflement de la boîte creuse, elle avait quelque chose de lointain qui bouleversait Emma (376/377).
Frédéric, en face, distinguait l’ombre de ses cils. (10). Quoiqu’ils fussent bruns, ils semblaient noirs à cause des cils. (23).
Plus il la contemplait, plus il sentait entre elle et lui se creuser des abîmes, (10). Car il sentait entre elle et lui comme de vagues abîmes. (137).
Frédéric voulut la baiser. (11). Léon la baisa sur le cou à plusieurs reprises. (168).
Il ambitionnait d’être un jour le Walter Scott de la France. (17). Avec Walter Scott, plus tard, elle s’éprit de choses historiques. (54).
« Serviteur, messieurs ! ». Celui qui les prononçait était un petit homme, habillé d’une ample redingote brune, et coiffé d’une casquette laissant paraître sous la visière un nez pointu… Le Nogentais justifia sa présence en contant qu’il revenait d’inspecter ses pièges à Loudans son jardin, au bord de l’eau. (21). Il était vêtu d’une redingote bleue… et sa casquette de cuir, à pattes nouées par des cordons sur le sommet de la tête, laissait voir sous la visière relevée, un front chauve (107/108).Sa casquette, enfoncée jusqu’aux yeux, les lèvres grelottantes et le nez rouge… (234). Le percepteur, par-là, tâchait de dissimuler la crainte qu’il venait d’avoir… (234). Serviteur, madame, reprit-il d’un ton sec. (235).
M. Dambreuse s’appelait de son vrai nom le comte d’Ambreuse ; mais, dès 1825, abandonnant peu à peu sa noblesse et son parti, il s’était tourné vers l’industriel, et, l’oreille dans tous les bureaux, la main dans toutes les entreprises,… il avait amassé une fortune que l’on disait considérable ; de plus, il était officier de la Légion d’Honneur, membre du Conseil Général de l’Aube, député, pair de France un de ces jours ; complaisant du reste, il fatiguait le ministre par ses demandes continuelles de secours, de croix, de bureaux de tabac… (24). Secrétaire d’État sous la Restauration, le marquis, cherchant à rentrer dans la vie politique, préparait de longue main sa candidature à la Chambre des Députés II faisait, l’hiver, de nombreuses distributions de fagots, et, au Conseil Général, réclamait avec exaltation toujours des routes pour son arrondissement. (66).
Frédéric, en même temps qu’elle, arriva de l’autre côté sous la porte cochère. L’espace n’étant pas assez large, il fut contraint d’attendre… Le cocher lâcha les rênes, le cheval frôla la borne brusquement, et tout disparut. (26). « Gare » cria une voix sortant d’une porte cochère qui s’ouvrait. Elle s’arrêta pour laisser passer un cheval noir… La voiture s’élança et disparut. (419/20).
Lui, il allait tous les matins à l’École, se promenait ensuite dans le Luxembourg,… et, avec quinze cents francs par an… il se trouvait parfaitement heureux. (28).Peut-être valait-il mieux courir droit au but, déclarer son amour ? Alors, il composa une lettre de douze pages, pleine de mouvements lyriques et d’apostrophes, mais il la déchira, et ne fit rien, ne tenta rien, immobilisé par la peur de l’insuccès. (29). Il ne mangeait pas le premier du mois l’argent de son trimestre… ou bien, assis le soir, sous les tilleuls du Luxembourg… (327).Il se torturait à découvrir par quel moyen lui faire sa déclaration ; et, toujours hésitant entre la crainte de lui déplaire et la honte d’être si pusillanime, il en pleurait de découragement et de désirs. Puis il prenait des décisions énergiques, il écrivait des lettres qu’il déchirait, s’ajournait à des époques qu’il reculait. (142).
Il regardait avec dédain le vieux comptoir d’acajou, les serviettes tachées, l’argenterie crasseuse et les chapeaux suspendus contre la muraille… Des restes de nourriture couvraient toutes les tables. Les deux garçons fatigués dormaient dans des coins, et une odeur de cuisine, de quinquet et de tabac emplissait la salle déserte. (30). dont les tables noires sont poissées par les glorias, les vitres épaisses jaunies par les mouches, les serviettes tachées par le vin bleu (312).On sentait l’absinthe, le cigare et les huîtres. (372).
Il retourna aux cours. Mais comme il ne connaissait rien aux matières élucidées, des choses très simples l’embarrassèrent. (31). Il n’y comprit rien ; il avait beau écouter, il ne saisissait pas. (15).
Il se rendit aux bals de l’Opéra… D’ailleurs, il était retenu par la crainte d’un affront pécuniaire, s’imaginant qu’un souper avec un domino entraînait à des frais considérables, était une grosse aventure. (31). M. Léon, avait passablement fréquenté la Chaumière… Quant à faire des excès, il s’en abstenait, autant par pusillanimité que par délicatesse. (327).
Sa grande passion pour Mme Arnoux commençait à s’éteindre. (33)…. et Frédéric aurait accepté d’être sourd, infirme et laid pour un nom illustre et des cheveux blancs… (60). Mais peu à peu ce sentiment s’affaiblit. (327)…. et portent enfin, à soixante ans, quand vient l’âge des rhumatismes, une brochette en croix sur leur habit noir, mal fait. (88).Il envia des épaulettes, des croix, des titres. (379).
Elle se tenait debout, près du clavier, les bras tombants, le regard perdu… Sa voix de contralto prenait dans les cordes basses une intonation lugubre qui glaçait, et alors sa belle tête, aux grands sourcils, s’inclinait sur son épaule ; sa poitrine se gonflait, ses bras s’écartaient, son cou d’où s’échappaient des roulades se renversait mollement, comme sous des baisers aériens… (60-61). Sa voix harmonieuse et faible se perdait sur les flots ; et le vent emportait les roulades… Elle se tenait en face… Elle avait la tête levée, les mains jointes, et les deux yeux vers le ciel. (362/363).
Elle leur tendit la main ; elle la tendit également à Frédéric ; et il éprouva comme une pénétration à tous les atomes de sa peau. (61). …Il tendit la main, elle hésita.— À l’anglaise donc, fit-elle, abandonnant la sienne, tout en s’efforçant de rire. Léon la sentit entre ses doigts ; et la substance même de tout son être lui semblait descendre dans cette paume humide. (169).
Il lui montra l’art de reconnaître les vins, à brûler le punch, à faire des salmis de bécasses… (68). Homais excellait à faire quantité de confitures, vinaigres et liqueurs douces, et il connaissait aussi… l’art de conserver les fromages et de soigner les vins malades. (139).
Frédéric suivait docilement ses conseils, — aimant tout ce qui dépendait de Mme Arnoux, ses meubles, ses domestiques, sa maison, sa rue. (68). Son mari, n’était-ce pas quelque chose d’elle ? (143).
Il humait en cachette la senteur de son mouchoir ; son peigne, ses gants, ses bagues, étaient pour lui des choses particulières, importantes… (69). Il ne pouvait se retenir de toucher continuellement à son peigne, à ses bagues, à son fichu… (50).
Martinon se taisait, craignant d’offenser quelqu’un. En sept ans de collège, il n’avait pas mérité de pensum, et, à l’École de droit, il savait plaire aux professeurs. (70)…. il trouvait la compagnie de ces jeunes gens alléchante comme un mauvais lieu, et instructive comme une Sorbonne. (71). — Sans doute, répondait le médecin nonchalamment, soit que, avant les mêmes idées, il voulût n’offenser personne… (309)….et se maintenait en de bons termes avec les professeurs. (327). C’était comme l’initiation au monde, l’accès des plaisirs défendus. (16).
… il confessait d’abord son échec, occasionné par des changements faits dans le programme, — un hasard, une injustice… Mme Moreau, qui l’attendait le lendemain, fut chagrinée doublement. Elle cacha la mésaventure de son fils… (77). Il fit demander sa mère, lui conta tout. Elle l’excusa, rejetant l’échec sur l’injustice des examinateurs… Cinq ans plus tard seulement, M. Bovary connut la vérité. (17).On l’attendait le soir même à la maison pour le fêter de son succès. (17).
De temps à autre, il s’arrêtait à l’étalage d’un bouquiniste… quelquefois, l’espoir d’une distraction l’attirait vers les boulevards… Mais les charrettes, les boutiques recommençaient, et la foule l’étourdissait. ( 80). Souvent je sortais, je me traînais le long des quais, m’étourdissant au bruit de la foule… Il y a sur le boulevard, chez un marchand d’estampes, une gravure italienne… (330).
Il se donna jusqu’à la rue de Richelieu pour déclarer son amour. (83). Charles se donna jusqu’au coin de la haie… (36).
… les petites pantoufles de satin à bordure de cygne semblaient attendre son pied… (84). Elle considérait la rosette de ses pantoufles, et elle faisait dans leur satin de petits mouvements par intervalles, avec les doigts de son pied. (331).C’étaient des pantoufles en satin rose, bordées de cygne. (373).
Quand il allait au Jardin des Plantes, la vue d’un palmier l’entraînait vers des pays lointains. Ils voyageaient ensemble, au dos des dromadaires, sous le tendelet des éléphants, dans la cabine d’un yacht parmi des archipels bleus, ou côte à côte, sur deux mulets à clochettes, qui trébuchent dans les herbes contre des colonnes brisées. Quelquefois, il s’arrêtait au Louvre devant de vieux tableaux ; et son amour l’embrassant jusque dans les siècles disparus, il la substituait aux personnages des peintures. Coiffée d’un hennin, elle priait à deux genoux derrière un vitrage de plomb. Seigneuresse des Castilles ou des Flandres, elle se tenait assise, avec une fraise empesée et un corps de baleines à gros bouillons. Puis elle descendait quelque grand escalier de porphyre, au milieu des sénateurs, sous un dais de plumes d’autruche, dans une robe de brocart. D’autres fois, il la rêvait en pantalon de soie jaune, sur les coussins d’un harem. (84). Et vous y étiez,… vous surtout, paysages blafards des contrées dithyrambiques, qui souvent nous montrez à la fois, des palmiers, des sapins, des tigres à droite, un lion à gauche, des minarets tartares à l’horizon, au premier plan des ruines romaines, puis des chameaux accroupis ; — le tout encadré d’une forêt vierge bien nettoyée, et avec un grand rayon de soleil perpendiculaire tremblotant dans l’eau, où se détachent… des cygnes qui nagent. (55/56).Elle aurait voulu vivre dans quelque vieux manoir, comme ces châtelaines au long corsage qui, sous le trèfle des ogives, passaient leurs jours… (54).C’était, derrière la balustrade d’un balcon, un jeune homme en court manteau qui serrait dans ses bras une jeune fille en robe blanche…Et vous y étiez aussi, sultans à longues pipes, pâmés sous des tonnelles, aux bras des bayadères… (55).
… et, incapable d’action, maudissant Dieu et s’accusant d’être lâche, il tournait dans son désir, comme un prisonnier dans son cachot. (85). Et, toujours hésitant entre la crainte de lui déplaire et la honte d’être si pusillanime, il en pleurait de découragement et de désirs. (142).
Il se pencha vers la petite fille, et, écartant ses jolis cheveux bruns, la baisa au front doucement. (105). Léon la baisa sur le cou à plusieurs reprises. (168).
Épisode de la rencontre de Frédéric avec le ménage Dambreuse, au théâtre de la Porte Saint-Martin. (108-109). Épisode de la rencontre de Léon et du ménage Bovary, à l’Opéra de Rouen (321/25).
L’intervention du père Roque dans les affaires de Mme Moreau (109-110). … et, d’une voix que les larmes étouffaient :« Ah ! mon pauvre garçon, il m’a fallu abandonner bien des rêves ! ». (110). Le rôle de Lheureux dans la déconfiture d’Emma Bovary. (passim). « Si vous saviez, reprit-elles, en levant au plafond ses beaux yeux qui roulaient une larme, tout ce que j’avais rêvé ! » (330).
On l’avait considéré jusqu’alors comme un jeune homme de grands moyens, qui devait être la gloire du département (112). « C’est une femme de grands moyens, et qui ne serait pas déplacée dans une sous-préfecture. » (152).
…et regardait par la fenêtre les attelages de rouliers qui passaient. (113). La nuit, quand les mareyeurs, dans leurs charrettes, passaient sous ses fenêtres,… elle s’éveillait… (82).
— et même son amour avait pris comme une douceur funèbre, un charme assoupissant. À force d’avoir versé sa douleur dans ses lettres,… il l’avait presque tarie, si bien que Mme Arnoux était pour lui comme une morte, dont il s’étonnait de ne pas connaître le tombeau… (118). …le boudoir en soie jaune… (119), Le soir, quand ils furent seuls tous les deux… (119). Quant au souvenir de Rodolphe, elle l’avait descendu tout au fond de son cœur ; et il restait là, plus solennel et plus immobile qu’une momie de roi dans un souterrain. Une exhalaison s’échappait de ce grand amour embaumé… (303).D’un boudoir à stores de soie… (85).Charles et sa mère restèrent le soir… fort longtemps à causer ensemble. (477).
Pour faire durer son plaisir, Frédéric s’habilla le plus lentement possible… (128). Léon, le lendemain… passa un pantalon blanc, des chaussettes fines, un habit vert… (337/338).
Il lut tout le Siècle du jour, et le relut ; il examina, jusque dans les grains du papier, la caricature du Charivari ; à la fin, il savait par cœur les annonces… (130). Ses yeux rencontrèrent un vitrage bleu, où l’on voit des bateliers qui portent des corbeilles. Il le regarda longtemps, attentivement, et il comptait les écailles des poissons et les boutonnières des pourpoints… (340).
Le soleil brillait, l’air était doux, des troupes d’oiseaux voletant s’abattaient dans le jardin ; … et l’on entendait les rires des enfants, avec le murmure continu que faisait la gerbe du jet d’eau. (138). … le tuyau du poêle, en forme de palmier, arrondissait au plafond blanc sa gerbe dorée ; et, près d’eux, derrière le vitrage, en plein soleil, un petit jet d’eau gargouillait dans un bassin de marbre… (393).
La fête chez Rosanette. (141-155). La fête à la Vaubyessard. ( 66/77).
…en costumes de roulier, de débardeur ou de matelot. ( 142). …lequel s’appelant Auguste Delamare… (148).Le cabotin avait une mine vulgaire, faite comme les décors de théâtre pour être contemplée à distance, des mains épaisses, de grands pieds, une mâchoire lourde ; et il dénigrait les acteurs les plus illustres, disait « mon organe, mon physique, mes moyens », en émaillant son discours de mots peu intelligibles pour lui-même, et qu’il affectionnait, tels que « morbidezza, analogue et homogénéité », (149-150). Le jour de la mi-carême… s’éteignaient. (409/410)…. débardeuses ou matelots… (410).C’est le nom de l’officier de santé qui a servi de modèle à Charles. Sa taille vigoureuse était prise dans un pourpoint de couleur brune… et il roulait des regards langoureusement en découvrant ses dents blanches… le cabotin diplomate avait même soin de faire toujours glisser dans les réclames une phrase poétique sur la fascination de sa personne et la sensibilité de son âme. Un bel organe, un imperturbable aplomb, plus de tempérament que d’intelligence et d’emphase que de lyrisme, achevaient de rehausser cette admirable nature de charlatan, où il y avait du coiffeur et du toréador. (316).
L’ombre et les chuchotements se mêlaient. Il y avait de petits rires sous des mouchoirs, et l’on entrevoyait au bord des corsages des frémissements d’éventails, lents et doux comme des battements d’aile d’oiseau blessé. (151). Sur la ligne des femmes assises, les éventails peints s’agitaient, les bouquets cachaient à demi le sourire des visages… (72).
Et l’Enfant de chœur, homme facétieux, en faisant un grand signe de croix, commença le Benedicite. Les dames furent scandalisées… Arnoux, non plus, « n’aimait pas ça », trouvant qu’on devait respecter la religion. (152). M. Bovary père exigea que l’on descendît l’enfant, et se mit à le baptiser avec un verre de champagne qu’il lui versait de haut sur la tête. Cette dérision du premier des sacrements indigna l’abbé Bournisien. (128/129).
Alors, elle prit sur le poêle une bouteille de vin de Champagne, et elle le versa de haut, dans les coupes qu’on lui tendait. ( 154). …avec un verre de champagne qu’il lui versait de haut sur la tête. (128).
Une autre soif lui était venue, celle des femmes, du luxe, et de tout ce que comporte l’existence parisienne. (156). Son cœur était comme eux : au frottement de la richesse, il s’était placé dessus quelque chose qui ne s’effacerait pas. (81).
Mme Dambreuse était auprès du feu, une douzaine de personnes formant cercle autour d’elle. Avec un mot aimable, elle lui fit signe de s’asseoir… Assise au fond sur la causeuse… (159-160). Une des dames se leva (la marquise elle-même), vint à la rencontre d’Emma, et la fit asseoir près d’elle, sur une causeuse, où elle se mit à lui parler amicalement (69).
Elle les souleva tous les deux, et haussant jusqu’à lui leur museau noir : « Voyons, faites une risette, baisez le monsieur ». (162). Elle appelait Djali, la prenait entre ses genoux, passait ses doigts sur sa longue tête fine, et lui disait : « Allons, baisez maîtresse ». (65).
L’homme se mit à la coiffer. Puis il causa théâtres ; on donnait le soir à l’Ambigu une représentation extraordinaire. — « Irez-vous ? » — « Ma foi, non ! Je reste chez moi ». (162). Souvent, le garçon, en la coiffant, lui proposait des billets pour le bal masqué. (375). Ils causaient d’une troupe de danseurs espagnols que l’on attendait bientôt sur le théâtre de Rouen. — « Vous irez ? », demanda-t-elle. — « Si je peux », répondit-il. (135).
Marthe, un peu plus loin… (165). L’édition originale de l’E.S. porte Berthe au lieu de Marthe. C’est le prénom de la fille d’Emma Bovary.
 « Ah ! très bien ! Ils ont du bois dans leur cheminée, des truffes sur leur table, un bon lit, une bibliothèque, une voiture, toutes les douceurs ! Mais qu’un autre grelotte sous les ardoises, dîne à vingt sous, travaille comme un forçat, et patauge dans la misère ! est-ce leur faute ? » Et il répétait « Est-ce leur faute ? » avec une ironie cicéronienne qui sentait le Palais. (188).  « Tu ne les as pas ! » Elle répéta plusieurs fois : « Tu ne les as pas !… » … Mais lorsqu’on est si pauvre, on ne met pas d’argent à la crosse de son fusil !.. Oh ! rien ne lui manque ! jusqu’à un porte-liqueurs dans sa chambre ; car tu t’aimes, tu vis bien, tu as un château, des fermes, des bois, tu chasses à courre, tu vas à Paris. » (437/438).
Les grandes torchères, comme des bouquets de feu, s’épanouissaient sur les tentures ; elles se répétaient dans les glaces ; et, au fond de la salle à manger, que tapissait un treillage de jasmin, le buffet ressemblait à un maître-autel de cathédrale, ou à une exposition d’orfèvrerie — tant il y avait de plats, de cloches, de couverts et de cuillers en argent et en vermeil, au milieu des cristaux à facettes qui entrecroisaient, pardessus les viandes, des lueurs irisées. (193). Les bougies des candélabres allongeaient des flammes sur les cloches d’argent ; les cristaux à facettes, couverts d’une buée mate, se renvoyaient des rayons pâles, des bouquets étaient en ligne sur toute la longueur de la table… Les pattes rouges des homards dépassaient des plats ; de gros fruits dans des corbeilles à jour s’étageaient sur la mousse ; les cailles avaient leurs plumes… ( 69/70).
…un sportsman contait une histoire de chasse… (193). On entourait un tout jeune homme qui avait battu, la semaine d’avant, Miss Arabelle et Romulus, et gagné deux mille louis, à sauter un fossé, en Angleterre. (74).
« Faites qu’on raffermisse la religion ! » (195). « La religion, plus affermie, sourit à tous les cœurs ». (201).
Sous l’abat-jour vert des bougies, des rangées de cartes et de pièces d’or couvraient la table. (195). … on entendait le bruit clair des louis d’or qui se versaient à côté, sur le tapis des tables… (73).
…Le bruit du bal s’affaiblissait ; les voitures commençaient à s’en aller. (198). Les voitures, les unes après les autres, commencèrent à s’en aller… les banquettes s’éclaircirent (75).
Martinon, au bas de l’escalier, alluma un cigare ; et il offrait en le suçant un profil tellement lourd, que son compagnon lâcha cette phrase : « Tu as une bonne tête, ma parole ! » — « Elle en a fait tourner quelques-unes », reprit le jeune magistrat, d’un air à la fois convaincu et vexé. (199). « Tu fumes donc ? », demanda-t-elle. — « Quelquefois, quand l’occasion se présente. » … Charles se mit à fumer. Il fumait en avançant les lèvres, crachant à toute minute, se reculant à chaque bouffée. « Tu vas te faire mal », dit-elle dédaigneusement. (79/80).
Frédéric affirmait que son existence, de même, se trouvait manquée… Il répondait par des sourires amers ; car, au lieu d’exprimer le véritable motif de son chagrin, il en feignait un autre, sublime… langage, du reste, qui ne dénaturait pas complètement sa pensée. (209). Pour se faire valoir, ou par une imitation naïve de cette mélancolie qui provoquait la sienne, le jeune homme déclara s’être ennuyé prodigieusement… Car ils précisaient de plus en plus les motifs de leur douleur, chacun, à mesure qu’il parlait, s’exaltant un peu dans cette confidence progressive. Mais ils s’arrêtaient quelquefois devant l’exposition complète de leur idée, et cherchaient alors à imaginer une phrase qui pût la traduire cependant. (329/330).
Donc, il résolut de la posséder à lui seul, et d’aller vivre ensemble bien loin, au fond d’une solitude ; il cherchait même sur quel lac assez bleu, au bord de quelle plage assez douce, si ce serait l’Espagne, la Suisse ou l’Orient. (210). Au galop de quatre chevaux, elle était emportée depuis huit jours vers un pays nouveau, d’où ils ne reviendraient plus… Souvent, du haut d’une montagne, ils apercevaient tout à coup quelque cité splendide avec des dômes, des ponts, des navires, des forêts de citronniers, et des cathédrales de marbre blanc… Ils habiteraient… au fond d’un golf, au bord de la mer… et leur existence serait facile et large… toute chaude et étoilée comme les nuits douces qu’ils contempleraient, (277).
Quand il ne dînait pas chez eux, vers neuf heures, il se postait au coin de la rue ; et, dès qu’Arnoux avait tiré la grande porte, Frédéric montait vivement les deux étages et demandait à la bonne d’un air ingénu : « Monsieur est là ? ». Puis faisait l’homme surpris de ne pas le trouve. (210). En quittant, la veille au soir M. et Mme Bovary, Léon, de loin les avait suivis dans la rue ; puis, les ayant vus s’arrêter à la Croix-Rouge, il avait tourné les talons et passé toute la nuit à méditer un plan. Le lendemain donc, vers cinq heures, il entra dans la cuisine de l’auberge, la gorge serrée, les joues pâles, et avec cette résolution des poltrons que rien n’arrête. «Monsieur n’y est point » répondit un domestique. Cela lui parut de bon augure. Il monta. (328).
et sa biographie, vendue dans, les entr’actes, le dépeignait comme soignant sa vieille mère, lisant l’Évangile, assistant les pauvres… (214). Le cabotin diplomate avait même soin de faire toujours glisser dans les réclames une phrase poétique sur la fascination de sa personne et la sensibilité de son âme. (316).
Arnoux… s’assit… comme un homme accablé. « Qu’y a-t-il donc ? » — « Je suis perdu ! ». Il avait à verser, le même jour, en l’étude de Me Beauminet, notaire rue Sainte-Anne, dix-huit mille francs, prêtés par un certain Vanneroy. (221). … » et songer que, d’ici à huit jours, j’aurai des rentrées ! on me doit peut-être cinquante mille francs pour la fin du mois ! » (222). Cf. l’épisode où Lheureux réclame à Emma, de la part de Vinçart, le paiement immédiat de ses dettes, et obtient contre elle une saisie. (411/414). « Nous avons emprunté ; les clients ne payaient pas. Du reste la liquidation n’est pas finie. Nous en aurons plus tard. Mais aujourd’hui, faute de trois mille francs, on va nous saisir. » (437).
Mme Arnoux était seule, devant une armoire à glace… Elle jeta un cri, et disparut. Puis elle revint, correctement habillée. Sa taille, ses yeux, le bruit de sa robe, tout l’enchanta. Frédéric se retenait pour ne pas la couvrir de baisers. (237). Emma, dans sa chambre, était à faire sa toilette ; il arrivait à pas muets, il la baisait dans le dos, elle poussait un cri. Il ne pouvait se retenir de toucher continuellement à son peigne, à ses bagues, à son fichu ; quelquefois, il lui donnait sur les joues de gros baisers à pleine bouche, ou c’étaient de petits baisers à la file… (50).
Frédéric… se lança enfin dans une grande période sur l’affinité des âmes. Une force existait, qui peut, à travers les espaces, mettre en rapport deux personnes, les avertir de ce qu’elles éprouvent, et les faire se rejoindre. (238). On ne s’explique, on se devine. On s’est entrevu dans ses rêves… Enfin, il est là, ce trésor qui l’on a tant cherché ; il brille, il étincelle… (202).Et s’il se rencontre enfin deux pauvres âmes, tout est organisé pour qu’elles ne puissent se joindre. Elles essayeront cependant, elles battront des ailes, elles s’appelleront Oh ! n’importe, tôt ou tard, dans six mois, dix ans, elles se réuniront, s’aimeront, parce que la fatalité l’exige, et qu’elles sont nées l’une pour l’autre. (206).Le clerc se récria que les natures idéales étaient difficiles à comprendre. Lui, du premier coup d’œil, il l’avait aimée ; et il se désespérait en pensant au bonheur qu’ils auraient eu si, par une grâce du hasard, se rencontrant plus tôt, ils se tussent attachés l’un à l’autre d’une manière indissoluble. (334/335).
Elle l’écoutait, la tête basse, tout en souriant de son beau sourire. Il l’observait du coin de l’œil, avec joie, et épanchait son amour plus librement. (238). Et, s’applaudissant d’avoir franchi la difficulté, Léon, du coin de l’œil, épia sa physionomie. Ce fut comme le ciel, quand un coup de vent chasse les nuages. L’amas des pensées tristes qui les assombrissaient parut se retirer de ses yeux bleus ; tout son visage rayonna. (332).
« Êtes-vous assez enfant, mon Dieu ! » ( 240). « Enfant que vous êtes ! » (325).
Il continua de lui-même la démonstration… prodiguant les termes de chimie, chlorure, sulfure, borax, carbonate. (241). Parfois même,… il… lui adressait des conseils pour la manipulation des ragoûts et l’hygiène des assaisonnements ; il parlait arôme, osmazôme, sucs et gélatine d’une façon à éblouir. (139).
Toute la visite de la faïencerie, avec les explications de Sénécal (238-243). La visite de la cathédrale de Rouen, avec les explications du Suisse. (338/344).
Cet adieu, répété deux fois, son froncement de sourcils en contemplant le poignard, sa résignation et son air solennel, surtout, firent rêver Frédéric, qui bientôt n’y pensa plus. (II, p. 20). Il conta des histoires. Charles se surprit à rire ; mais le souvenir de sa femme, lui revenant tout à coup, l’assombrit. On apporta le café ; il n’y pensa plus. (31/32).
Mme Dambreuse se tourna vers lui. « Donnez-moi donc mon éventail, qui est sur cette console, là-bas. Vous vous trompez! l’autre ! ». Elle se leva ; et, comme il revenait, ils se rencontrèrent au milieu du salon, face à face ; elle lui adressa quelques mots, vivement, des reproches sans doute, à en juger par l’expression altière de sa figure. (43). Une dame, près d’elle, laissa tomber son éventail. Un danseur passait : « Que vous seriez bon, monsieur, dit la dame, de vouloir bien ramasser mon éventail qui est derrière ce canapé ». Le monsieur s’inclina, et, pendant qu’il faisait le mouvement d’étendre son bras, Emma vit la main de la jeune femme qui jetait dans son chapeau quelque chose de blanc, plié en triangle. Le monsieur ramenant l’éventail, l’offrit à la dame, respectueusement ; elle le remercia d’un signe de tête et se mit à respirer son bouquet. (75).
Il fit des offres de dévouement, exalta ses propres mérites ; et il la regardait en face, à travers ses lunettes qui miroitaient. Une torpeur vague la prenait ; mais tout à coup : « Voyons l’affaire, je vous prie ! » … Il se pencha sur son épaule, et si près d’elle, qu’il effleura sa joue. Elle rougit ; cette rougeur enflamma Deslauriers ; il lui baisa la main voracement. « Que faites-vous, monsieur ! » Et, debout contre la muraille, elle le maintenait immobile, sous ses grands yeux noirs irrités. « Écoutez-moi ! je vous aime ! ». (55-56). … en se penchant sur elle de si près que la pointe de sa moustache lui effleura la joue. (322).
Puis, tout à coup : « Mais oui, je l’aime !… je l’aime ! » …Et elle restait au bord de son fauteuil, les prunelles fixes, et souriant toujours. (57). « Monsieur, dit-elle, je vous prierais… » — « De quoi, madame ? J’écoute. » Elle se mit à lui exposer sa situation… (424).« Je vous suis pourtant très dévoué. Vous n’en doutez plus, j’espère ? ». Il tendit sa main, prit la sienne, la couvrit d’un baiser vorace… une étincelle jaillissait de sa pupille à travers le miroitement de ses lunettes… Elle sentait contre sa joue le souffle d’une respiration haletante. Cet homme la gênait horriblement. Elle se leva d’un bond, et lui dit : « Monsieur, j’attends ! » — « Quoi donc ? », fit le notaire, qui tout à coup devint extrêmement pâle. — « Cet argent ». — « Mais… ». Puis, cédant à l’irruption d’un désir trop fort : « Eh bien, oui… ! De grâce, restez ! Je vous aime ! ». Il la saisit par la taille. Un flot de pourpre monta vite au visage de Mme Bovary. (426/427).« Oui, charmant ! charmant… N’aime-t-il pas ? » se demanda-t-elle. « Qui donc ?… mais c’est moi ! »… son cœur bondit… elle ne put s’empêcher de sourire. (145/146).
« Toutes vos poupées, qui avaient des noms de reines, ou de marquises, que sont-elles devenues ? » — « Ma foi, je n’en sais rien ! » — « Et votre roquet Moricaud ! » — « Il s’est noyé, le pauvre chéri ! » — « Et le Don Quichotte, dont nous colorions ensemble les gravures ? » — « Je l’ai encore ! ». Il lui rappela le jour de sa première communion, et comme elle était gentille aux vêpres, avec son voile blanc et son grand cierge, pendant qu’elles défilaient toutes autour du chœur, et que la cloche tintait. (57). Alors ils se racontèrent les petits événements de cette existence lointaine… Il se rappelait le berceau de clématite, les robes qu’elle avait portées, les meubles de sa chambre, toute sa maison. « Et nos pauvres cactus, où sont-ils ? » — « Le froid les a tués cet hiver ». (332/333).
À gauche, dans la prairie, des peupliers s’étendent, et l’horizon, en face, est borné par une courbe de la rivière ; elle était plate comme un miroir ; de grands insectes patinaient sur l’eau tranquille. Des touffes de roseaux et des joncs la bordent inégalement… Dans une anse du rivage, des nymphéas s’étalaient ; et un rang de vieux saules, cachant des pièges à loup était, de ce côté de l’île, toute la défense du jardin. En deçà, dans l’intérieur, quatre murs à chaperon d’ardoises enfermaient le potager, où les carrés de terre, labourés nouvellement, formaient des plaques brunes. Les cloches des melons brillaient à la file sur leur couche étroite… De la clématite embarrassait les charmilles… Le soleil frappait la cascade ; les blocs verdâtres du petit mur, où l’eau coulait, apparaissaient comme sous une gaze d’argent se déroulant toujours. Une longue barre d’écume rejaillissait au pied, en cadence. Cela formait ensuite des bouillonnements, des tourbillons, mille courants opposés, et qui finissaient par se confondre en une seule nappe limpide. (58-61). Ils s’en revinrent à Yonville en suivant le bord de l’eau. Dans la saison chaude, la berge plus élargie découvrait jusqu’à leur base les murs des jardins, qui avaient un escalier de quelques marches descendant à la rivière. Elle coulait sans bruit, rapide et froide à l’œil. ; de grandes herbes minces s’y courbaient ensemble, selon le courant qui les poussait, et, comme des chevelures vertes abandonnées s’étalaient dans sa limpidité. Quelquefois, à la pointe des joncs ou sur la feuille des nénuphars, un insecte à pattes fines marchait ou se posait… les vieux saules ébranchés miraient dans l’eau leur écorce grise… Les murs des jardins, garnis à leur chaperon de morceaux de bouteilles, étaient chauds comme le vitrage d’une serre ;… quelque branche des chèvrefeuilles et des clématites qui pendaient au dehors, traînait un moment sur la soie, en s’accrochant aux effilés. (134/135).
 « On se réfugie dans le médiocre, par désespoir du beau qu’on a rêvé ». (80).« Est-ce qu’après avoir désiré tout ce qu’il y a de plus beau, de plus tendre, de plus enchanteur, une sorte de paradis sous forme humaine, et quand je l’ai trouvé, enfin, cet idéal, quand cette vision me cache toutes les autres… » (81). « II est si doux, parmi les désenchantements de la vie, de pouvoir se reporter en idée sur de nobles caractères, des affections pures et des tableaux de bonheur. » (119).« On ne s’explique pas, on se devine. On s’est entrevu dans ses rêves… Enfin, il est là, ce trésor, que l’on a tant cherché, là, devant vous ; il brille, il étincelle… » (202).
Elle acceptait ses caresses, figée par la surprise et par le ravissement. (81). Et, contemplant le jeune homme d’un regard attendri, elle repoussait doucement les timides caresses que ses mains frémissantes essayaient. (335).
 « Les convenances les plus simples exigent maintenant que je ne vous revoie plus. » (82). … tout maintenant était fini, et ils ne devaient plus, pour leur bonheur, se rencontrer. (p.337).
Cependant, où serait le mal quand deux pauvres êtres confondraient leur tristesse ? ( 82). « Et, s’il se rencontre enfin deux pauvres âmes, tout est organisé pour qu’elles ne puissent se joindre… Oh ! n’importe ! tôt ou tard, dans six mois, dans dix ans, elles se réuniront. (206).
Et il se laissa tomber sur les genoux, malgré lui, s’affaissant sous un poids intérieur trop lourd. (82). Et Rodolphe, insensiblement, se laissa glisser du tabouret jusqu’à terre. (220).
« Qu’est-ce que j’ai à faire dans le monde ? Les autres s’évertuent pour la richesse, la célébrité, le pouvoir ! Moi, je n’ai pas d’état, vous êtes mon occupation exclusive, toute ma fortune, le but, le centre de mon existence, de mes pensées. Je ne peux pas plus vivre sans vous que sans l’air du ciel. » (83). « Oui, je pense à vous continuellement ! Votre souvenir me désespère ! Ah ! pardon ! je vous quitte… Adieu !… J’irai loin… si loin que vous n’entendrez plus parler de moi !… Et cependant… aujourd’hui…, je ne sais encore quelle force m’a poussé vers vous ! Car on ne lutte pas contre le ciel, on ne résiste pas au sourire des anges ! » (219).
« Est-ce que vous ne sentez pas l’aspiration de mon âme monter vers la vôtre, et qu’elles doivent se confondre, et que J’en meurs ? » (83). « Et, s’il se rencontre enfin deux pauvres âmes, tout est organisé pour qu’elles ne puissent se joindre… Oh ! n’importe ! dans six mois, dans dix ans, elles se réuniront. » (206).
Mme Arnoux se mit à trembler de tous ses membres. « Oh ! allez-vous en ! Je vous en prie » L’expression bouleversée de sa figure l’arrêta. Puis il fit un pas. Mais elle se reculait, en joignant les deux mains. « Laissez-moi ! au nom du ciel ! de grâce ! » (83). Elle se recula tremblante. Elle balbutia : « Oh ! vous me faites peur, vous me faites mal ! Partons ! » (225).
Il ne parla point de son amour. Pour lui inspirer plus de confiance, il exagéra même sa réserve… (83). Et il redevint aussitôt respectueux, caressant, timide. (225).
Elle lui dit son existence d’autrefois, à Chartres, chez sa mère ; sa dévotion vers douze ans ; puis sa fureur de musique, lorsqu’elle chantait jusqu’à la nuit, dans sa petite chambre, d’où l’on découvrait les remparts. Il lui conta ses mélancolies au collège… si bien qu’en la voyant pour la première fois, il l’avait reconnue. (84). … Elle se mit à causer du couvent, Charles de son collège, les phrases leur vinrent ; ils montèrent dans sa chambre. Elle lui fit voir ses anciens cahiers de musique, les petits livres qu’on lui avait donnés en prix. (33).
Ces discours n’embrassaient, d’habitude, que les années de leur fréquentation. Il lui rappelait d’insignifiants détails, la couleur de sa robe à telle époque, quelle personne un jour était survenue, ce qu’elle avait dit une autre fois… (85). Lui, du premier coup d’œil, il l’avait aimée… ( 335).Alors, ils se racontèrent les petits événements de cette existence lointaine, dont ils venaient de résumer, par un seul mot, les plaisirs et les mélancolies. Il se rappelait le berceau de clématite, les robes qu’elle avait portées, les meubles de sa chambre, toute sa maison… « Une fois par exemple, je suis venu chez vous…» (pp.332/333).
…et elle répondait toute émerveillée : « Oui, je me rappelle ! »… Souvent celui des deux qui écoutait l’autre s’écriait : « Moi aussi ! » Et l’autre à son tour reprenait. « Moi aussi ! » (85).  « C’est vrai ! c’est vrai ! », disait-elle… « J’ai éprouvé cela », répondit-elle. (119).Et elle disait de temps à autre, à voix basse, et les paupières à demi-fermées : « Oui !… c’est vrai !… c’est vrai… c’est vrai ! » (334).
Puis c’étaient d’interminables plaintes sur la Providence : « Pourquoi le ciel ne l’a-t-il pas voulu ! Si nous nous étions rencontrés ! » « Ah ! si j’avais été plus jeune ! », soupirait-elle. — « Non ! moi un peu plus vieux ! ». (85). Alors commença l’éternelle lamentation : « Oh ! si le ciel l’avait voulu ! Pourquoi n’est-ce pas ? qui empêchait donc ? » (146)…. et il se désespérait en pensant au bonheur qu’ils auraient eu si, par une grâce du hasard, se rencontrant plus tôt, ils se fussent attachés l’un a l’autre… (335). « Non, mon ami ! », répondit-elle… je suis trop vieille… vous êtes trop jeune… oubliez-moi ! » (335).
Et ils s’imaginaient une vie exclusivement amoureuse, assez féconde pour remplir les plus vastes solitudes, excédant toutes joies, défiant toutes les misères, où les heures auraient disparu dans un continuel épanchement d’eux-mêmes, et aurait fait quelque chose de resplendissant et d’élevé comme la palpitation des étoiles. (86). Elle entrait dans quelque chose de merveilleux, où tout serait passion, extase, délire ; une immensité bleuâtre l’entourait, les sommets du sentiment étincelaient sous sa pensée, l’existence ordinaire n’apparaissait qu’au loin, tout en bas, dans  l’ombre, entre les intervalles de ces hauteurs. (229).
…perdue dans cette insouciance qui caractérise les grands bonheurs. (86). Les bonheurs futurs, comme les rivages des tropiques, projettent sur l’immensité qui les précède leurs mollesses natales, une brise parfumée, et l’on s’assoupit dans cet enivrement sans même s’inquiéter de l’horizon qu’on n’aperçoit pas. (135/136).
D’ailleurs elle touchait au mois d’août des femmes, époque tout à la fois de réflexion et de tendresse, où la maturité qui commence colore le regard d’une flamme plus profonde, quand la force du cœur se mêle à l’expérience de la vie, et que, sur la fin de ses épanouissements, l’être complet déborde de richesse dans l’harmonie de sa beauté. Jamais elle n’avait eu plus de douceur, d’indulgence. (86). Jamais Mme Bovary ne fut aussi belle qu’à cette époque ; elle avait cette indéfinissable beauté qui résulte de la joie, de l’enthousiasme, du succès, et qui n’est que l’harmonie du tempérament avec les circonstances. Ses convoitises, ses chagrins l’expérience du plaisir et ses illusions toujours jeunes, comme font aux fleurs le fumier, la pluie, les vents, le soleil, l’avaient par gradation développée, et elle s’épanouissait enfin dans la plénitude de sa nature. (275).
…elle s’abandonnait à un sentiment qui lui semblait un droit conquis par ses chagrins. (86). D’ailleurs Emma éprouvait une satisfaction de vengeance. N’avait-elle pas assez souffert ? Mais elle triomphait maintenant… (229).
 « Pourquoi cette défiance, comme si j’étais un misérable capable d’abuser !.. » (89).  « Qu’aviez-vous donc ? pourquoi ? je n’ai pas compris ! Vous vous méprenez sans doute ?… » (226).
« Si j’avais seulement une preuve !.. » — « Quelle preuve ? » — « Celle qu’on donnerait au premier venu… » (89). « Non ! je vous aime, voilà tout ! Vous n’en doutez pas ! Dites-le-moi ! un mot ! un seul mot ! » ( 220).
« Voulez-vous que je vous attende au coin de la rue Tronchet et de la rue de la Ferme ? » — « Mon Dieu !… mon ami… », balbutiait Mme Arnoux. Sans lui donner le temps de réfléchir, il ajouta : « Mardi prochain, je suppose ? » — « Mardi ? » — « Oui, entre deux et trois heures ? » — « J’y serai ! ». (89-90). « Il faut pourtant que je vous voie encore », reprit-il, « j’avais à vous dire… » — « Quoi ? » — « Une chose grave, sérieuse… Faites par pitié que je vous revoie une fois… une seule. » — « Eh bien ! » Elle s’arrêta ; puis, comme se ravisant : « Oh ! pas ici ! » — « Où vous voudrez. » — « Voulez-vous ?… » Elle parut réfléchir, et d’un ton bref : « Demain, à onze heures, dans la Cathédrale. » — « J’y serai », s’écria-t-il… (336/337).
Frédéric lui posa ses lèvres sur la nuque. « Oh ! ce n’est pas bien », dit-elle, « vous me feriez repentir ». Il s’écarta, redoutant la mobilité ordinaire des femmes. Puis, sur le seuil, murmura, doucement comme une chose bien convenue : « À mardi ! ». Elle baissa ses beaux yeux, d’une façon discrète et résignée. (90). … il se pencha vers son cou, et la baisa longuement à la nuque. « Mais vous êtes fou !… » Léon fit trois pas en arrière, pour sortir. Il resta sur le seuil ; puis il chuchota d’une voix tremblante : « À demain ! ». Elle répondit par un signe de tête et disparut. (337).
Frédéric avait un plan. (90). … et passé toute sa nuit à méditer un plan. (328).
Il choisit une paire de pantoufles en satin bleu. (90). … même elle disait mes pantoufles, un cadeau de Léon, une fantaisie qu’elle avait eue. C’étaient des pantoufles en satin rose bordées de cygne, (372).
…mit des bruyères sur la cheminée, des violettes sur la commode. (90). …des marchandes, nu-tête, tournaient dans du papier des bouquets de violettes. Le jeune homme en prit un. C’était la première fois qu’il achetait des fleurs pour une femme. (338).
Ils allaient l’apercevoir et l’entraîner. Il se réfugia vivement dans la rue de l’Arcade. (92). Cependant, il avait peur d’être aperçu ; il entra résolument dans l’église, (338).
Et, par désœuvrement, il examinait les rares boutiques : un libraire, un sellier, un magasin de deuil. Bientôt, il connut les noms des ouvrages, tous les harnais, toutes les étoffes (93). Il le regarda longtemps, attentivement, et il comptait les écailles des poissons et les boutonnières des pourpoints… (340).
Une fois, il aperçut, à trente pas environ, une femme de même taille, avec la même robe. Il la rejoignit : ce n’était pas elle. (94-95). J’ai cru vous reconnaître au coin des rues ; et je courais après tous les fiacres où flottait à la portière un châle, un voile pareil au vôtre. (331).
Mme Arnoux fut saisie d’épouvante. Elle se jeta sur les sonnettes, en appelant au secours, en criant : « Un médecin ! un médecin ! ». (95-96). Mme Bovary se précipita pour la relever, cassa le cordon de la sonnette, appela la servante de toutes ses forces, et elle allait commencer à se maudire… (163).
« Le vaisseau de l’État est ballotté sur une mer orageuse ! » (1). (108). «… et qui dirige à la fois d’une main si ferme et si sage le char de l’État parmi les périls incessants d’une mer orageuse. » ( 200).
Trois cents rires éclatèrent d’un seul coup. Le plafond trembla… Ce fut un paroxysme, un délire. On se pressait les côtes. Quelques-uns même tombaient par terre, sous les bancs. (127). Il y eut un rire éclatant des écoliers, qui décontenança le pauvre garçon… (7).Ce fut un vacarme qui s’élança d’un bond, monta en crescendo avec des éclats de voix aigus… puis qui roula en notes isolées, se calmant, à grand-peine, et parfois qui reprenait tout à coup, sur la ligne d’un banc où saillissait encore çà et là, comme un pétard mal éteint, quelque rire étouffé. (8).
« Mais les employés de l’octroi sont envers nos filles et nos sœurs d’une indécence… » (128). « Envoyez donc vos filles à confesse à des gaillards d’un tempérament pareil !… » (110).
… s’étendit sur la mission civilisatrice du comédien. Puisque le théâtre était le foyer de l’instruction nationale… (128). Le théâtre, prétendait-il, servait à fronder les préjugés, et sous le masque du plaisir, enseignait la vertu. (307).
… il se commanda deux plats de viande, un homard, une omelette au rhum, une salade, etc… le tout arrosé de sauternes 1819, avec un romanée 42, sans compter le Champagne au dessert, et les liqueurs. (140). … trois homards engourdis s’allongeaient jusqu’à des cailles… Homais se délectait. Quoiqu’il se grisât de luxe encore plus que de bonne chère, le vin de Pomard, cependant, lui excitait les facultés, et lorsqu’apparut l’omelette au rhum… (393/394).
Les deux coudes au bord de la table, et penché très bas, Arnoux, en le fatiguant de son regard, lui confiait ses imaginations. (140).Il avait, par complaisance, un peu trop bu. (141). Léon, étourdi par la colère d’Emma, le bavardage de M. Homais, et peut-être les pesanteurs du déjeuner, restait indécis, et comme sous la fascination du pharmacien… (396).
La visite du château de Fontainebleau. (145-147). La visite de la cathédrale de Rouen. (341/344).
… et cette exhalaison des siècles, engourdissante et funèbre comme un parfum de momie, se fait sentir même aux têtes naïves. (148). Quant au souvenir de Rodolphe,… il restait là, plus solennel et immobile qu’une momie de roi dans un souterrain. Mais une exhalaison s’échappait de ce grand amour embaumé… (303).
Seulement, on entendait le souffle du cheval dans les brancards, avec un cri d’oiseau très faible, répété. (150). Souvent on entendait sous les buissons, glisser un petit battement d’ailes, ou bien le cri rauque et doux des corbeaux… (224).
La lumière, à de certaines places éclairant la lisière du bois, laissait les fonds dans l’ombre ; ou bien, atténuée sur les premiers plans par une sorte de crépuscule, elle étalait dans les lointains des vapeurs violettes, une clarté blanche. Au milieu du jour, le soleil, tombant d’aplomb sur les larges verdures, les éclaboussait, suspendait des gouttes argentines à la pointe des branches, rayait le gazon de traînées d’émeraudes, jetait des taches d’or sur les couches de feuilles mortes ; en se renversant la tête, on apercevait le ciel, entre les cimes des arbres. (150). Mais ils entendirent les deux chevaux qui broutaient le feuillage. (226).Les ombres du soir descendaient ; le soleil horizontal, passant entre les branches, lui éblouissait les veux. Çà et là, tout autour d’elle, dans les feuilles ou par terre, des taches lumineuses tremblaient, comme si des colibris, en volant, eussent éparpillé leurs plumes. Le silence était partout ; quelque chose de doux semblait sortir des arbres. (226/27).
Ce soir-là, ils dînèrent dans une auberge, au bord de la Seine… On leur servit un poulet avec les quatre membres étendus, une matelote d’anguilles dans un compotier en terre de pipe… (153). Ils se plaçaient dans la salle basse d’un cabaret, qui avait à sa porte des filets noirs suspendus. Ils mangeaient de la friture d’éperlans, de la crème et des cerises. (362).
… et, plus loin, à gauche, le toit d’une maison faisait une tache rouge sur la rivière, qui semblait immobile dans toute la longueur de sa sinuosité. Des  joncs se penchaient pourtant, et l’eau secouait légèrement des perches… (153). … et l’on voyait sur la rivière de larges gouttes grasses, ondulant inégalement sous la couleur pourpre du soleil, comme des plaques de bronze florentin, qui flottaient. (361).Ce n’était pas la première fois qu’ils apercevaient des arbres, du ciel bleu, du gazon, qu’ils entendaient l’eau couler et la brise soufflant dans le feuillage… (362).
Quand ils se reposaient au milieu de la campagne, il s’étendait la tête sur ses genoux,… ou bien, couchés sur le ventre au milieu de l’herbe, ils restaient l’un en face de l’autre, à se regarder, plongeant dans leurs prunelles, altérés d’eux-mêmes, s’en assouvissant toujours, puis, les paupières entre fermées, ne parlant plus. (154). Ils se couchaient sur l’herbe ; ils s’embrassaient à l’écart sous les peupliers ; et ils auraient voulu, comme deux Robinsons, vivre perpétuellement dans ce petit endroit— ; mais ils n’avaient sans doute jamais admiré tout cela, comme si la nature… n’eût commencé à être belle que depuis l’assouvissance de leurs désirs. (362).
Et elle ôta, une par une, les brindilles de chardons accrochées dans le bas de sa robe. (156). … et alors délicatement, de ses doigts gantés, elle enlevait les herbes rudes avec les petits dards des chardons. (40).
Frédéric jura sa parole d’honneur qu’il n’avait  jamais pensé à Mme Arnoux, étant trop amoureux d’une autre. « De qui donc ? ». « Mais de vous, ma toute belle ! ». « Ah ! ne te moque pas de moi ! Tu m’agaces ! ». Il jugea prudent d’inventer une histoire, une passion. Il trouva des détails circonstanciés. Cette personne, du reste, l’avait rendu fort malheureux. (157). Un jour,… elle vint à dire (pour expérimenter sa jalousie, ou cédant peut-être à un besoin d’épanchement trop fort) qu’autrefois, avant lui, elle avait aimé quelqu’un, « pas comme toi », reprit-elle vite, protestant sur la tête de sa fille qu’il ne s’était rien passé. Le jeune homme la crut, et néanmoins la questionna pour savoir ce qu’il faisait. (379).
« Mais tu trembles ! » — « C’est que  j’ai froid », reprit-elle. (182). Elle frissonna. « Tu souffres ? », fit Léon, en se rapprochant d’elle. — « Oh ! ce n’est rien. Sans doute la fraîcheur de la nuit. » (363).
« Comment va ce bon Arnoux ? » — « Parfaitement ! Il est sorti ! » — « Ah !  je comprends ! toujours ses vieilles habitudes du soir ; un peu de distraction ! » — « Pourquoi pas ? Après une journée de calculs, la tête a besoin de se reposer ! » Elle vanta même son mari, comme travailleur. Cet éloge irritait Frédéric ; et désignant sur ses genoux un morceau de drap noir, avec des soutaches bleues : « Qu’est-ce que vous faites là ? » — « Une veste que j’arrange pour ma fille. » — « À propos, je ne l’aperçois pas. Où est-elle donc ? » — « Dans une pension », reprit Mme Arnoux. Des larmes lui vinrent aux yeux ; elle les retenait, en poussant son aiguille rapidement. Il avait pris par contenance un numéro de l’Illustration, sur la table, près d’elle. « Ces caricatures de Cham sont très drôles, n’est-ce pas ? » — « Oui. » Puis ils retombèrent dans leur silence. (188-189). La conversation fut languissante, Madame Bovary l’abandonnant à chaque minute, tandis qu’il demeurait lui-même comme tout embarrassé. Assis sur une chaise basse, près de la cheminée, il faisait tourner dans ses doigts l’étui d’ivoire ; elle poussait son aiguille… Elle regarda la pendule. Charles était en retard. Alors elle fit la soucieuse. Deux ou trois fois même, elle répéta : « Il est si bon ! » Le clerc affectionnait M. Bovary. Mais cette tendresse à son endroit l’étonna d’une façon désagréable ; néanmoins il continua son éloge… « Ah ! c’est un brave homme », reprit Emma. — « Certes », reprit le clerc… Puis elle retomba dans son silence. (149/50).
…et intérieurement (il) souhaitait la considération bourgeoise. Une maîtresse comme Mme Dambreuse le poserait (197-198). D’ailleurs, n’était-ce pas une femme du monde, et une femme mariée ! une vraie maîtresse enfin ? (374).
(Il) ne manquait pas d’aller la saluer dans sa loge au théâtre. (198).Pour des indications de curiosités, des renseignements sur un concert, des emprunts de livres ou de revues, c’était un échange continuel de petits billets. (198). « Lui-même ! Il va venir te présenter ses civilités. » Et comme il achevait ces mots, l’ancien clerc d’Yonville entra dans la loge. (321).Ainsi s’établit entre eux une sorte d’association, un commerce continuel de livres et romances. (141).
Il lui lisait des pages de poésie, en y mettant toute son âme, afin de l’émouvoir, et pour se faire admirer. (198)…. se figurant qu’elle avait des délicatesses de sentiment, rares comme ses dentelles, avec des amulettes sur la peau, et des pudeurs dans la dépravation. (199). Souvent elle le priait de lui lire des vers ; Léon les déclamait d’une voix traînante et qu’il faisait expirer soigneusement aux passages d’amour. (140)…. glorifiaient toutes la religion, les délicatesses du cœur et les pompes de la cour. (51)…. puis il éprouva un certain charme à la voir, au milieu du rendez-vous, perdue dans les oraisons comme une marquise andalouse. (341). Il admirait l’exaltation de son âme et les dentelles de sa jupe. (374).
Du reste, tous les hommes étaient des égoïstes. Il y en avait pourtant de dévoués, quand ce ne serait que lui. « Ah ! bah ! comme les autres ! » (200). « Ah ! tu me quitteras, toi !… tu te marieras…. tu seras comme les autres. » Il demandait « quels autres ? »… : « Vous êtes tous des infâmes ! » (379).
« Oui ! vous me faites peur ! Je vous offense, peut-être !… Pardon !… Je ne voulais pas dire tout cela ! Ce n’est pas ma faute ! Vous êtes si belle ! » (201). « Oui, je pense à vous continuellement !… Votre souvenir me désespère ! Ah ! pardon !… Je vous quitte… Adieu… J’irai loin… Et cependant… aujourd’hui… je ne sais quelle force m’a poussé vers vous ! » (219).
 … et il fut surpris par la facilité de sa victoire. Les grands arbres du jardin qui frissonnaient mollement s’arrêtèrent. Des nuages immobiles rayaient le ciel de longues bandes rouges, et il y eut comme une suspension universelle des choses. (201). … elle s’abandonna. Les ombres du soir descendaient ; le soleil horizontal, passant entre les branches, lui éblouissait les veux… Le silence était partout ; quelque chose de doux semblait sortir des arbres. (227).
Il semblait à Frédéric, en descendant l’escalier, qu’il était devenu un autre homme, que la température embaumante des serres chaudes l’entourait, qu’il entrait définitivement dans le monde singulier des adultères patriciens et des hautes intrigues. (201). Rien autour d’eux n’avait changé ; et pour elle, cependant quelque chose était survenu de plus considérable que si les montagnes se fussent déplacées… (227).Elle entrait dans quelque chose de merveilleux où tout serait passion, extase, délire… et la légion lyrique de ces femmes adultères se mit à chanter dans sa mémoire. (229).
Tous les respects pour sa vertu le délectaient comme un hommage retournant vers lui. (208). Et sa poitrine en les respirant se gonfla d’orgueil, comme si cet hommage qu’il destinait à une autre se fût retourné vers lui. (338).
Elle voulait un grand amour, elle se mit à le combler d’adulations et de caresses. (209).Elle lui envoyait des fleurs ; elle lui fit une chaise en tapisserie ; elle lui donna un porte-cigares, une écritoire, mille petites choses, pour qu’il n’eût pas une action indépendante de son souvenir, (209). Et ils se regardaient face à face, avec des rires de volupté et des appellations de tendresse. (372).Elle allait prendre… le porte-cigares en soie verte… A qui appartenait-il » au Vicomte. C’était peut-être un cadeau de sa maîtresse ? (81).Outre la cravache à pommeau de vermeil, Rodolphe avait reçu un cachet… de plus une écharpe pour se faire un cache-nez, et enfin un porte-cigares tout pareil à celui du Vicomte. (269).
Elle montait dans un fiacre, le renvoyait à l’entrée d’un passage, sortait par l’autre bout ; puis, se glissant le long des murs, avec un double voile sur le visage, elle atteignait la rue où Frédéric en sentinelle lui prenait le bras, vivement, pour la conduire dans sa maison, (209). Par peur d’être vue, elle ne prenait pas ordinairement le chemin le plus court. Elle s’engouffrait dans les ruelles sombres… Elle tournait une rue : elle le reconnaissait à sa chevelure frisée, qui s’échappait de son chapeau. Léon, sur le trottoir, continuait à marcher. Elle le suivait jusqu’à l’hôtel ; il montait, il ouvrait la porte ; il entrait. (372)
La chance les enhardit. Leurs rendez-vous se multiplièrent… Ces surprises pouvaient être dangereuses ; il la blâma de son imprudence. (209). Cette première audace lui ayant réussi, chaque fois, maintenant, que Charles sortait de bonne heure, Emma… descendait à pas de loup… (231).Et enfin, il déclara d’un air sérieux que ses visites devenaient imprudentes et qu’elle se compromettait. (232).
On avait tiré le lit complètement hors de l’alcôve… Sur la table de nuit, couverte d’une serviette blanche, trois flambeaux brûlaient. (214). Et deux grands cierges brûlaient au chevet du lit, que l’on avait tiré hors de l’alcôve. (462).
Ses paupières s’étaient rouvertes ; et les pupilles, bien que noyées dans des ténèbres visqueuses, avaient une expression énigmatique intolérable, (215). …et ses yeux commençaient à disparaître dans une pâleur visqueuse, (463).
Le prêtre, qui venait à se moucher… (215). M. Bournisien, de temps à autre, se mouchait bruyamment. (463).
Un marbrier l’attendait pour lui montrer des devis et des plans de tombeaux grecs, égyptiens, mauresques. (217). Il proposa d’abord un tronçon de colonne avec une draperie, ensuite une pyramide, puis un temple de Vesta, une manière de rotonde… ou bien « un amas de ruines »… Enfin, après avoir examiné une centaine de dessins, s’être commandé un devis,…Charles se décida pour un mausolée. (484).
« Moi qui l’ai encore vu il y a un mois ! Mon Dieu ! C’est notre sort à tous ! ». (217). « Une si bonne personne ! Dire pourtant, que je l’ai encore vue samedi dernier dans ma boutique ! » (476).
Le catafalque au bas du chœur formait, avec ses grands cierges, un seul foyer de lumières jaunes. (217-218)…. le maître des cérémonies, de temps à autre, leur faisait signe de se lever, de s’agenouiller, de se rasseoir. (218). …et, près du lutrin, la bière reposait entre quatre rangs de cierges, (472). On chantait, on s’agenouillait, on se relevait… (473).
La cloche tinta, on sortit de l’église. (218).La cérémonie n’avait pas duré trop longtemps ; on s’en félicitait. (221). La cloche recommença… et l’on sortit de l’église. (473)…. et il ne tarda pas à s’apaiser, éprouvant peut-être, comme tous les autres, la vague satisfaction d’en avoir fini. (475).
Les deux coffres-forts baillaient, défoncés à coups de merlin… elle venait d’apercevoir une petite boîte à serrure de cuivre, (221). Il découvrit une boîte, la défonça d’un coup de pied. (487).
« On ne t’a même pas vu aux Comices agricoles ! ». (225). Cf. l’épisode des Comices Agricoles. (186-217).
… en dépliant un papier où on la prévenait que M. Moreau vivait conjugalement avec une certaine Rose Bron. (227). En effet, quelqu’un avait envoyé à sa mère une longue lettre anonyme, pour la prévenir qu’il se perdait avec une femme mariée. (407).
Et puis il craignait peut-être d’en trop apprendre. (228). D’ailleurs Charles n’était pas de ceux qui descendent au fond des choses ; il recula devant les preuves. (480).Par respect, ou par une espèce de sensualité qui lui faisait mettre de la lenteur dans ses investigations, Charles n’avait pas encore ouvert le compartiment secret d’un bureau de palissandre. (487).
Le lendemain, M. Athanase Gautherot se présenta, flanqué de deux acolytes, l’un blême… l’autre portant un faux-col et des sous-pieds très tendus… Leur patron, un fort bel homme, au contraire, commença par s’excuser de sa mission pénible, tout en regardant l’appartement, « plein de jolies choses, ma parole d’honneur ! ». Il ajouta « outre celles qu’on ne peut saisir ». Sur un geste, les deux recors disparurent. Alors, ses compliments redoublèrent. Pouvait-on croire qu’une personne aussi… charmante n’eût pas d’ami sérieux ! On ne s’en relève jamais. Il tâcha de l’effrayer ; puis, la voyant émue, prit subitement un ton paterne. Il connaissait le monde, il avait eu affaire à toutes ces dames ; et, en les nommant, il examinait les cadres sur les murs. C’étaient d’anciens tableaux du brave Arnoux, des esquisses de Sombaz, des aquarelles de Burieu, trois paysages de Dittmer. Rosanette n’en savait pas le prix, évidemment. Maître Gautherot se tourna vers elle… A ce moment, Frédéric… entra… Maître Gautherot reprit sa dignité ; et, comme la porte était restée ouverte : « Allons ! messieurs, écrivez ! Dans la seconde pièce, nous disons : une table de chêne, avec ses deux rallonges, deux buffets… ». (232). Elle fut stoïque, le lendemain, lorsque Me Hareng, l’huissier, avec deux témoins, se présenta chez elle pour faire le procès-verbal de la saisie. Ils commencèrent par le cabinet de Bovary, et n’inscrivirent point la tête phrénologique, qui fut considérée comme instrument de sa profession ; mais ils comptèrent dans la cuisine, les plats, les marmites, les chaises, les flambeaux, et dans sa chambre à coucher toutes les babioles de l’étagère… Me Hareng, boutonné dans un mince habit noir, en cravate blanche, et portant des sous-pieds fort tendus, répétait de temps à autre : « Vous permettez, madame, vous permettez ? » Souvent il faisait des exclamations : « Charmant ! fort joli ! » Puis il se remettait à écrire… Quand ils en eurent fini avec les appartements, ils montèrent au grenier. Elle y gardait un pupitre où étaient enfermées les lettres de Rodolphe. Il fallut l’ouvrir. « Ah ! une correspondance ! », dit Me Hareng avec un sourire discret. « Mais permettez, car je dois m’assurer si la boite ne contenait pas autre chose. » (415/416).
Tout à coup, Rosanette dit d’une voix tendre : « Nous le conserverons, n’est-ce pas ? ». (242). Alors elle tâcha de l’émouvoir, et s’émotionnant elle-même, elle vint à lui conter l’étroitesse de son ménage, ses tiraillements, ses besoins. Il comprenait cela ; une femme élégante !… Mais lorsqu’elle demanda mille écus, il serra les lèvres, puis se déclara très peiné de n’avoir pas eu autrefois la direction de sa fortune, car il y avait cent moyens fort commodes, même pour une dame, de faire valoir son argent… (425).Puis, d’une voix balbutiante et effrayée : « Oh ! non ! n’est-ce pas ? je veux la garder ! » (459).
Mais, peu à peu (l’artiste en lui l’emportant)… (243). Car ses convictions philosophiques n’empêchaient pas ses admirations artistiques. (127).
Tout à coup, un craquement de porte se fit entendre. « Mais il y a quelqu’un ? » — « Oh ! non, monsieur ! C’est le vent ». (247). « On marche là-haut ! », dit Charles. « Non ! reprit-elle, c’est une lucarne restée ouverte, et que le vent remue. » (416).
« Une vraie tête de linotte ! Il brûlait la chandelle par les deux bouts ! ». (249). « Tous ces grands artistes brûlent la chandelle par les deux bouts ! » (310).
« Vente d’un riche mobilier, consistant en batterie de cuisine, linge de corps et de table, chemises, dentelles, jupons, pantalons, cachemires français et de l’Inde, piano d’Érard, deux bahuts de chêne Renaissance, miroirs de Venise, poteries de Chine et du Japon. » (253). Elle s’acheta des plumes d’autruche, de la porcelaine chinoise et des bahuts. (405). Emma lut d’un clin d’œil que tout son mobilier était à vendre ! (423).Ils comptèrent, dans la cuisine, les plats, les marmites, les chaises, les flambeaux… Ils examinèrent ses robes, le linge, le cabinet de toilette. (415).
… et le partage de ces reliques, où il retrouvait confusément les formes de son corps, lui semblait une atrocité, comme s’il avait vu des corbeaux déchiquetant son cadavre. (257). … et son existence, jusque dans ses recoins les plus intimes, fut comme un cadavre que l’on autopsie, étalée tout au long aux regards de ces trois hommes. (415)
« Votre personne, vos moindres mouvements me semblaient avoir dans le monde une importance extraordinaire. (267)….dans votre nom que je me répétais, en tâchant de le baiser sur mes lèvre ». (267). Je me suis dit : « Mais il m’aime !… il m’aime !… ». (267). « Vous étiez dans ce temps-là, pour moi, je ne sais quelle force incompréhensible qui captivait ma vie. » (333)…. et elle répétait, en avançant ses lèvres comme pour un baiser… (145).« N’aime-t-il pas ? », demanda-t-elle. « Qui donc ? Mais c’est moi ! » (145).
Une autre crainte l’arrêta, celle d’en avoir dégoût plus tard. D’ailleurs, quel embarras ce serait ! (268).  « Oui ; mais comment s’en débarrasser ensuite ? » (184).