Flaubert, Bouilhet, Malot, Maupassant  – l’École de Rouen

Flaubert, Bouilhet, Malot, Maupassant – l’École de Rouen –

Journée d’étude organisée par les associations des Amis d’Hector Malot et des Amis de Flaubert et de Maupassant

Samedi 23 mars 2019 – Hôtel des Sociétés savantes, 190 rue Beauvoisine, Rouen

Entrée libre et gratuite

L’École de Rouen : si cette dénomination s’applique généralement à un groupe de peintres impressionnistes rouennais, elle a également été utilisée, tantôt sérieusement, tantôt ironiquement, pour désigner les nombreux jeunes écrivains et publicistes ralliés autour de Flaubert mais aussi de Bouilhet, dont Hector Malot fut très proche. Au même moment, Eugène Noël, ami de Michelet, Levallois et Malot, parlait également d’École de Rouen à propos des hommes de science groupés autour du Dr Pouchet, dont tous les Rouennais, littérateurs en tête, prirent le parti dans sa mémorable controverse avec Pasteur autour de la question de la « génération spontanée ». C’est cette ambition rouennaise de concurrencer la capitale dans le domaine des lettres et des sciences qui sera envisagée lors de cette journée.

Matinée

9h30. Accueil et présentation de la journée, par Francis Marcoin et Yvan Leclerc

10h. Francis Marcoin, L’École de Rouen : une chimère à deux visages

11h. Joëlle Robert, L’École de Rouen dans la Revue de Rouen, à partir de 1833 : une École de Rouen avant l’École de Rouen

11h30. Christa Delahaye, Madame de Montarcy de Louis Bouilhet (1856): Bouilhet, Flaubert et les quarante Rouennais

Après-midi

14h30. Yvan Leclerc, La notion d’École de Rouen dans la réception critique des œuvres de Flaubert

15h. Agnès Thomas-Vidal, « Être de la même coterie » –  Les mémoires d’un critique du « petit » Levallois (1895)

Avec l’aide de la Ville de Rouen, du département de Seine-Maritime et du CNL

Résumés

Francis Marcoin, L’École de Rouen : une chimère à deux visages

Cette intervention vise à donner une idée générale de la question, en insistant sur la réputation de dynamisme, voire d’activisme, des jeunes Normands et Rouennais au moment de la parution de Madame Bovary. Cette idée revient constamment dans la presse, qui se plaît à parler d’école rouennaise, dont le chef de file pour le roman serait Gustave Flaubert et pour le théâtre et la poésie Louis Bouilhet. De son côté, l’écrivain rouennais Eugène Noël parle aussi d’école de Rouen, en l’étendant au domaine scientifique. Sur ce terrain, c’est le docteur Félix Pouchet qui est considéré comme le maître. Les deux domaines, littéraires et scientifiques, sont très liés dans cette prétention à faire de Rouen une sorte de capitale pouvant rivaliser avec Paris. La plupart de ces jeunes littérateurs se retrouvent dans L’Opinion nationale, lancé en 1859, où Hector Malot tiendra une rubrique littéraire avant de se cantonner dans le compte rendu de courses hippiques ! Son ami Jules Levallois, quant à lui, y donnera avec persévérance de longues chroniques marquées par l’ambition de prendre les choses de très haut.

Joëlle Robert, L’École de Rouen dans la Revue de Rouen, à partir de 1833 : une École de Rouen avant l’École de Rouen

Dans cette première moitié du xixe siècle, où le nombre de lecteurs s’accroît considérablement, l’effervescence littéraire favorise le développement de l’édition et la naissance de nombreuses revues. La Revue de Rouen naît en 1833 d’un désir de « décentralisation littéraire ». Ce mensuel, dont l’ambition est de rivaliser avec la capitale, publie des articles sur le patrimoine monumental ou folklorique local, mais sait élargir son intérêt à tous les domaines, littéraires, poétiques, historiques ou scientifiques. Le jeune Flaubert, qui admire deux prestigieux collaborateurs de cette revue, E.-H. Langlois et A. Chéruel, est influencé dans ses œuvres de jeunesse par ces publications de la vie intellectuelle.

Christa Delahaye, Madame de Montarcy de Louis Bouilhet (1856): Bouilhet, Flaubert et les quarante Rouennais

La pièce de Louis Bouilhet, Madame de Montarcy, fut l’occasion d’une nouvelle bataille d’Hernani, selon les humoristes de l’époque. Flaubert s’y impliqua beaucoup et fut un fervent « montarcyste ». Il est également intéressant de comparer Madame Bovary et Madame de Montarcy, deux titres qui consonnent tout en portant des esthétiques diamétralement opposées.

Yvan Leclerc, La notion d’École de Rouen dans la réception critique des œuvres de Flaubert

Flaubert se tient à distance de toutes les écoles et de la ville de Rouen. Pourtant, c’est peut-être à lui que l’on doit l’expression « École de Rouen ». On la trouve ensuite dans un article de réception de Madame Bovary, pris dans un sens péjoratif. Flaubert et Bouilhet ne pratiquent pas les mêmes genres littéraires, ils n’écrivent pas la même littérature, mais ils sont liés par une solide amitié, qui justifie cette commune appartenance, résumée par l’origine géographique qui les réunit.

Agnès Thomas-Vidal, « Être de la même coterie » ‒Les mémoires d’un critique du « petit » Levallois (1895)

Le nom de Jules Levallois est oublié, y compris à Rouen, sa ville natale, où l’on ne trouve aucune rue ni établissement scolaire portant son nom, encore moins de statue. Pour quelques érudits seulement il est le « secrétaire de Sainte-Beuve » ou « l’ami d’Hector Malot ». Dans son ouvrage Mémoires d’un critique, milieu de siècle, publié à la fin de sa vie, Jules Levallois évoque son parcours dans le paysage littéraire du xixe siècle. À sa lecture, on réalise que le « petit Levallois »*, comme l’avait baptisé Sainte-Beuve, a côtoyé les plus grands : Hugo, Taine, Sainte-Beuve, Sand, Barbey… et parmi eux, de nombreux Rouennais : Flaubert, Bouilhet, Malot, Chesneau, Noël, Michelet, Pouchet, Heuzey… L’importance et le rôle essentiel qu’a joué ce discret personnage dans l’avènement de ses compatriotes est incontestable et l’on peut aujourd’hui sans conteste le placer à l’épicentre de l’École de Rouen.

* « Le petit Levallois » dont parlait Sainte-Beuve. Article nécrologique de Jules Claretie (1840-1913) en première page du Figaro, le 18 septembre 1903.